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Les différentes méthodes pour louer des bateaux entre particuliers

08/03/2017

LOCATION JURIDIQUE 2

A travers cette nouvelle rubrique, nous aborderons le domaine de la plaisance à travers l’œil du juridique. C’est Henri Jeannin, avocat au barreau de Paris, qui répond ici à la question d’un lecteur qui souhaite louer son bateau.

 

1. La location en direct via une petite annonce ou par le bouche à oreille

Le propriétaire va devoir rédiger son contrat de location (dont il est facile de trouver des modèles sur la toile) et prendre quelques précautions. Il est conseillé d’établir un « état des lieux » signé après la visite du bateau à flot ou au sec s’il est à l’hivernage, et de vérifier les compétences nautiques du locataire et son permis s’il est requis. Bien entendu, il conviendra de demander un « acompte » afin de ne pas se retrouver le bec dans l’eau en cas d’annulation de dernière minute. La qualification de cette avance est importante. Entre consommateurs, il est présumé par le Code de la Consommation que les sommes versées d’avance sont des arrhes. Le locataire qui renonce à la location, perd les arrhes, le loueur qui reviendrait sur sa promesse  devant les restituer au double quant à lui. L’acompte au sens juridique du terme est en revanche différent de ce qu’on entend par là dans l’usage quotidien. Le locataire qui se rétracte lorsqu’un acompte est stipulé perd non seulement la somme avancée mais doit l’intégralité du loyer convenu (sauf cas de force majeure). Autant dire que pour éviter tout contentieux à ce sujet, le propriétaire devra préciser de façon très claire dans son contrat que la notion d’acompte s’entend dans l’acception du Code Civil. Il est également souhaitable de réclamer une « caution » c’est-à-dire un dépôt de garantie qui va servir à régler les frais de réparation des dégradations ou de petits dommages survenus pendant la location (qui correspondent aux franchises d’assurance), lorsqu’ils sont constatés à l’issue de la location au moment de la restitution du bateau de façon contradictoire dans un inventaire de sortie. De façon générale, le loueur a tout intérêt à détailler dans son contrat certains points qu’ils jugent essentiels pour prévenir les risques d’avaries et faciliter ensuite la gestion des fortunes de mer notamment avec son assureur. Il pourra par exemple définir : l’étendue de la zone de navigation autorisée, les conditions météo qui justifient de rester à quai ou de se rendre dans un port de refuge, l’obligation de ne mouiller que dans un port, l’interdiction de la navigation de nuit, l’obligation de l’avertir de toute avarie dans un délai très bref etc. Enfin le loueur devra également penser à mentionner avec exactitude le lieu où le bateau devra impérativement être restitué ainsi que l’heure limite de délivrance (matin ou après-midi) surtout s’il envisage de relouer. Lorsque le contrat est très explicite, le non-respect de ses stipulations par le locataire facilitera d’autant la mise en jeu de sa responsabilité, si la situation l’exige.

 

2. La location par l’intermédiaire d’un loueur professionnel ou location-gestion

Si le plaisancier se trouve loin de la côte ou craint de perdre son temps et son énergie à régler les inévitables soucis qu’occasionne la mise en location de son unité, il peut choisir de confier son bateau en gérance à un loueur professionnel tout en conservant la possibilité de l’utiliser de façon résiduelle. Cette formule est évidemment assez confortable mais elle a un coût non négligeable, le loueur professionnel pouvant conserver jusqu’à 40/45 % du montant des loyers. Les contrats sont assez variables d’un loueur à l’autre mais mettent à la charge du professionnel la commercialisation du bateau (via internet ou tout autre media), les prises en main et inventaires de début et de fin de location. Le propriétaire devra en général accorder un mandat exclusif au loueur sur une période de cinq ans incompressible. C’est le professionnel qui effectue l’entretien annuel du bateau. Il se charge également de l’hivernage, des réparations dus à la vétusté normale du bateau, et règle les frais d’anneau et les taxes annuelles. Mais tous ces services sont refacturés au propriétaire. C’est également le loueur professionnel qui assure le bateau sur sa propre police, et qui gère les sinistres s’il y a lieu. Cela ne prive pas le propriétaire de continuer à assurer son bateau pour son usage personnel. Par ailleurs le propriétaire qui a acquis un bateau neuf qu’il assure en valeur agréée, devra veiller à ce que son bateau ne soit pas simplement couvert en valeur vénale par la police du loueur professionnel. Le propriétaire garde un droit d’usage de son bateau mais il est généralement réduit aux périodes les moins agréables de la basse saison. L’inconvénient d’une telle formule, outre sa rentabilité financière moyenne, est qu’elle met souvent les bateaux à rude épreuve, les clients locataires prenant moins soin des bateaux qu’ils se procurent chez des loueurs professionnels. En cas d’avaries, les conditions dans lesquelles les réparations sont faites, et la qualité des travaux sont difficilement contrôlables, d’autant plus que les chantiers sont choisis et rémunérés par les loueurs. A l’issue du mandat de gestion et après restitution, le propriétaire risque parfois de découvrir certaines avaries occultes imputables à l’usage intensif et parfois brutal que les clients ont fait du bateau. Les recours contre le loueur professionnel sont dans cette hypothèse très aléatoires. Une certaine opacité de la gestion est donc à craindre dans cette formule qui demeure d’un coût élevé.

 

3. La location via un site internet

C’est une solution intermédiaire entre les deux formules qui est maintenant proposé sur plusieurs sites internet (Click & Boat, Samboat, Sailsharing, etc.). Le propriétaire bénéficie de la visibilité offerte par le site et de la sélection des candidats qu’elle permet. Il crée un compte et doit s’engager à fournir un bateau sous pavillon français en bon état de navigabilité comportant les équipements de sécurité conformes à la réglementation et à la catégorie de navigation. Il doit ensuite renseigner son annonce et définir les périodes de location, le prix de location et le montant de la caution et préciser les conditions d’annulation de la location. Le gestionnaire du site a le pouvoir de vérifier à tout moment l’état de tout bateau offert à la location sans en informer le propriétaire et de retirer toute annonce qu’il estime non conforme à ses Conditions Générales ou mensongère. Le propriétaire se voit proposer un certain nombre de services (essentiellement des modèles standard d’inventaire ou de contrat de location qu’il n’est pas tenu d’utiliser). Les locataires potentiels s’inscrivent sur le site et doivent déposer un CV ainsi qu’une copie de leur pièce d’identité et d’un justificatif de domicile de moins de trois mois. Il n’ y a cependant pas de contrôle autre que formel sur la réalité des compétences des locataires potentiels et leur identité et coordonnées. Certains sites offrent des conditions d’annulation aménagées tant au propriétaire qu’au locataire, si une avarie majeure survient avant la location ou si les compétences nautiques mentionnées dans la demande de location par le candidat locataire lui paraissent insuffisantes. L’intérêt de ce type de site consiste en une gestion simplifiée des paiements des loyers via le site avec une possibilité de versements échelonnés pour une location d’une certaine durée, les incidents de paiement provoquant une annulation de la location sous 48 h. Les retards de restitution du locataire sont généralement sanctionnés assez sévèrement par une pénalité forfaitaire et une indemnité fixe par jour de dépassement. En revanche le propriétaire continue à s’occuper lui-même de la caution, de la préparation du bateau, des inventaires et de sa prise en main ainsi que de sa restitution. C’est également lui qui va continuer à effectuer l’entretien de son bateau et à régler tous les frais et taxes afférents à son utilisation. De façon générale, ces sites de location ont une responsabilité réduite qui relève dans le pire des cas de la simple obligation de moyens. Il est toujours précisé que le site n’encourt aucune responsabilité quant à la véracité et à l’exactitude des informations figurant sur le CV des candidats locataires, et qu’il appartient au propriétaire de contrôler les informations lors de la prise en charge du bateau. En cas de vol d’un bateau, il serait cependant envisageable de poursuivre un site qui n’aurait pas contrôlé sérieusement l’identité d’un candidat locataire et la réalité de son domicile. Certains sites offrent parfois la possibilité au propriétaire de s’assurer pendant la période de location. Il est cependant préférable de conserver son assureur habituel et son intermédiaire (courtier ou agent d’assurance) avec lequel les relations seront plus faciles en cas de sinistre qu’avec un assureur inconnu dont la police a été souscrite par le biais d’une interface internet. Un assureur de ce type ne sera pas enclin à effectuer les gestes commerciaux qu’un agent d’assurance ou un courtier qui connaît le propriétaire peut être amené à faire pour conserver son client. Au bout du compte la formule est alléchante mais d’un coût tout de même élevé (15 % de commissions sur les loyers) pour les services rendus, dès lors que le gros de la gestion de la location demeure à la charge du propriétaire du bateau.

 

En conclusion

Comme toujours, il n’existe pas de formule magique, le propriétaire devant savoir s’il est prêt ou non à passer du temps et à dépenser de l’énergie à traiter les difficultés que peut parfois occasionner la location de son bien.

 

Henri Jeannin est avocat au barreau de Paris. Il est également membre correspondant de la Fédération des industries nautiques (FIN) et membre de l’Association française de droit maritime (AFDM). Il possède plus de 25 ans de pratique professionnelle principalement en droit de la plaisance, droit maritime et fluvial, droit des transports et droit des assurances.

Henri Jeannin - 7, rue Saint Lazare - 75009 PARIS. Tél. : 01 43 12 39 50 – mail : HJ@jeannin-avocats.fr - www.jeannin-avocats.fr

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